Témoignages de jeunes de Tessalit au nord du Mali

01/04/2015

Témoignages de jeunes de Tessalit au nord du Mali

Centre-ville de Kidal.

Compilation de quelques témoignages anonymes en provenance du nord du Mali. Ici les journalistes sont inexistants, les écoles sont fermées et l’administration en berne. Les jeunes, les vieux, les notables et les représentants des communautés craignent de parler en toute liberté de ce qu’ils vivent.

21 mars 2015

Il vaut mieux faire une fois que d’entendre mille fois… Tout le monde est debout, à travailler, survivre.
Les bruits et la fureur , on ne les entend plus. Pas la peine.

Nous, Touaregs, depuis les coups de crayon des frontières créées par des étrangers, nous vivons dans des territoires qui ont gommé notre culture, notre histoire, notre mode de vie.

Nous, Touaregs, nous vivons pour survivre dans ces territoires dérisoires où nous ne reconnaissons plus rien. Alors, armes ou pas, ce qui se passe en ce moment nous plonge dans un désespoir sans nom, dans une ombre de lune qui cache les grains de sable, les épines d’acacia et l’eau du puits.

Les accords, c’est une musique où la partition est ratée, une pièce de théâtre avec un rideau noir qui ne peut même plus se relever.

10 février 2015

Intimidations, pressions de toutes sortes entre groupes frères, chacun est chauffé à blanc.
Des tractations, des discussions, dans tous les campements, dans les villages… Il faut en sortir, de ces souffrances qui n’en finissent plus, mais comment rester serein après des années d’humiliations, de pouvoirs, d’alliances et contre-pouvoirs?
Comment prendre du recul quand on ne sait même plus défendre son territoire autrement que par les armes?
Comment respecter ses frères quand ils ont d’autres solutions que la tienne ?
Comment être capable d’écouter le sable et le vent dans l’infini du désert, en dehors de la poudre et du silence de la méfiance?
Comment?

Achaq, oui, mais fatigué. Si fatigué.

6 janvier 2015

Depuis l’attentat contre le camp militaire d’Amachach (Tessalit), les gens ont encore plus peur. Avant, les gens étaient venus de la brousse pour se protéger des islamistes, tout près d’Amachach.Depuis trois jours, ils sont tous repartis en brousse. Le quartier est déserté.

Où aller pour ne plus avoir peur? On ne peut rien dire, donner des informations, parler avec les autres , on ne sait pas de quel bord ils sont. Tu mets ta vie en danger tous les jours et tu ne sais pas de quel côté ça va tirer. On s’éloigne de tout le monde, surtout quand on ne le connait pas, des Blancs, des clairs, des autres.

Et la vie est arrêtée, toujours. Le moteur pour l’eau marche, le moteur pour l’électricité va marcher, inch Allah. Mais pas encore, pas tout de suite.

L’école, rien. Les enfants jouent au ballon, ou à la guerre, livrés à eux-mêmes. Le marabout de Tessalit accueille 40 à 50 enfants par jour.

Pas de campagne de vaccination pour les bêtes, pas de soins pour les malades, on a des médicaments dans sa poche, n’importe lesquels, pour soigner les toux et les rhumatismes.

Source: www.tamoudre.org

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Commentaires

Rima Moubayed
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J'ai le coeur serré en lisant tes lignes. J'espère que cette triste réalité ne durera plus longtemps. Courage.

Assaleck AG TITA
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Le fait de savoir que rien n'est éternel, me laisse croire que cette triste réalité prendra fin un jour. Surtout si ceux qui vivent cela au quotidien s'investissent véritablement dans la recherche de la paix et de la justice pour tous.Merci pour tes encouragements.