Une société qui néglige son capital avenir : les enfants

09/01/2014

Une société qui néglige son capital avenir : les enfants

Je ressens une profonde tristesse en voyant les enfants à Kidal et dans le Sahara en général vadrouiller tous les jours sans rien faire. On pourrait me dire : ils sont jeunes, l’avenir leur ouvrira des portes. C’est possible, mais, pour construire un avenir presque sûr, même s’il ne l’est jamais vraiment, ça commence aujourd’hui et non demain ni l’année prochaine.

Un jardinier et son fils à Intikoi  (Kidal)
Un jardinier et son fils à Intikoi (Kidal)

Attendre qu’un événement se calme ou cesse de faire mal est à mon sens une excuse non productive et pour tout dire nuisible. Un peu comme si nous n’étions ni en guerre ni en paix quelles que soient les circonstances. Nos ennemis les plus dangereux nous sont peut-être hélas encore méconnus. Et c’est tout l’enjeu. Le contexte actuel ne doit pas nous servir de prétexte pour ne pas entreprendre quelque chose, éventuellement apprendre un métier par exemple. Et peu importe ce qu’il en adviendra, car cette dynamique ne pourra plus s’arrêter, elle demandera encore davantage pour la satisfaction de tous ! Tout compte fait, c’est une expérience qui ne pourra que servir à un moment ou à un autre. Chacun pourra dire : au moins tu occuperas ton temps et tu pourras prendre en charge ne serait-ce que tes besoins personnels. Alléger les charges quotidiennes de la famille est une façon noble d’apprendre à se responsabiliser et faciliter la tâche de ceux qui se battent pour nourrir toutes ces bouches en devenir. Des pères et des mères encaissent des douleurs depuis bien longtemps en voyant leurs enfants dans cette situation sans pouvoir y remédier. Le devenir de ces enfants nous concerne tous. Ces enfants sont, certes, l’avenir de demain. Mais de quel avenir s’agit-il dans de telles conditions ? Si la société ne les prépare pas dès à présent à apprendre ce qui pourra les aider individuellement et à servir leur communauté!

Dans une ville de quelques milliers d’habitants où nous n’avons qu’un seul électricien et un seul peintre doit faire réfléchir plus d’un d’entre nous. Elle offre pourtant des opportunités à ces jeunes de se construire et de bâtir l’environnement propice à de meilleures conditions de vie. Ceux qui sont présentement professionnels dans un quelconque métier ont commencé à l’apprendre sur le tas. Il faut que la jeunesse du Sahara sache qu’il ne sert à rien de se pavaner en basin riche hors de prix ou dans un 4×4 extrêmement cher pendant qu’une simple toux ou un rhume conduit à la mort tous les jours certains de nos vieillards. Quel paradoxe !

Si nous ne voulons pas que nos pauvres bergers ne sombrent dans quelques années, il est nécessaire de savoir ce que nous voulons et où nous désirons aller !

Lorsque l’on voit des jeunes de moins de dix-sept ans avec un paquet de cigarettes et siroter du thé dans un oued, en croyant que c’est la meilleure façon de faire passer le temps ou de s’occuper, il faut un peu s’inquiéter sur le devenir de cette génération. Cela ressemble à un suicide. Et se demander si nous voulons bien sortir de cette situation ! Mais que faisons-nous concrètement pour sauver ce qui reste à sauver ?

On apprend aux enfants en bas âge que l’école est la clé de la réussite ! Il faudrait surtout dire aux enfants que l’école n’est pas forcément la clé de la réussite, mais qu’elle est incontestablement l’une des portes qui pourraient faciliter la réussite. Sinon, ils risquent d’être déçus. Beaucoup de gens savent aujourd’hui qu’il ne suffit pas d’obtenir un diplôme pour avoir un travail. C’est tout un ensemble de connaissances qui président à cette réussite, et cela ne s’apprend pas forcément à l’école, même si cette dernière facilite l’insertion et la pérennité dans le monde du travail. Il faut proposer aux enfants, surtout en cette période de crise, de toucher à tout, de se frotter à des petits métiers, l’une des options qu’offre le terrain présentement. Les générations à venir dépendront de ce que feront les enfants d’aujourd’hui. Certes, les écoles ne sont pas fonctionnelles, mais de là à rester immobiles et ne rien faire en disant qu’ « on attend le pouvoir central » est une aberration, une ignorance déconcertante de surcroît.  Si nous n’investissons pas dans le devenir de ces enfants, il ne faudra pas s’étonner de les voir se convertir en narcotrafiquants ou en bandits de tout genre dans un avenir proche. Un peu comme si l’on faisait en sorte de les priver d’un minimum d’éducation afin qu’ils puissent être plus facilement instrumentalisés dans l’avenir. Puisque les révoltes touarègues ont encore elles aussi un grand potentiel, une graine de révolte a été semée dans l’esprit des enfants de cinq ans et presque dans toutes les familles.

« La pauvreté n’est pas naturelle, ce sont les hommes qui la créent et la tolèrent, et ce sont les hommes qui la vaincront. Vaincre la pauvreté n’est pas un acte de charité, c’est un acte de justice ». Nelson Mandela

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